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Mahâbhârata
Sâvitrî et autres récits



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Il s'agit de cinq récits que nous avons rasemblés parce qu'ils donnent un éclairage intéresant sur la place de la femme dans la société indienne de l'époque (147 pages) : 


Histoire de Sâvitrî
Histoire de Shakuntalâ
Histoire de Sunda et Upasunda
Histoire d'Ambâ



Histoire de Sâvitrî (Sâvitryupakhyânam)
Mahâbhârata, Livre III - 277 à 282.


Sâvitrî épouse le roi Satyavant, mais elle sait que celui-ci doit mourir au bout d'une année. Et effectivement, au temps prescrit, au cours d'une promenade en forêt, son époux est pris d'un malaise, et tout de suite Yama, le dieu de la mort, se présente pour l'emporter. Sâvitrî va suivre le dieu, et le charmer de ses discours. Chaque fois, elle aura droit à un voeu, tout ce qu'elle désire, sauf la vie de son mari. La cinquième fois, Yama oublie de préciser cette dernière condition ; Sâvitrî en profite, et sauve ainsi son époux.


A la différence des autres fois, ô vénérable,
Tu n'oppose plus de restriction à mon bonheur.
Je choisis le voeu : "Que Satyavant revive !"

Privée de mon époux, il me semble mourir.
Privée de mon époux, que m'importe le bonheur.
Privée de mon époux, que m'importe le ciel.
Privée de mon époux, que m'importe de vivre.

Tu m'as accordé cent fils
Et tu emmènerais mon époux !
Je choisis : "Que Satyavant revive !"
Sois fidèle à ta parole.


Et c'est le happy end. Grâce à Sâvitrî, Satyavant revit, son vieux père recouvre et la vue et son royaume.


Histoire de Shakuntalâ (Shakuntalopakhyânam)

Mahâbhârata, Livre I - 62 à 69


Shakuntalâ est la fille d'une nymphe, élevée par l'ermite Kanva. Le roi Dusshanta, au cours d'une partie de chase, arrive à l'ermitage, y trouve seule la belle Shakuntalâ, la séduit et s'en va, non sans lui avoir promis de revenir la chercher pour la conduire au palais. Un enfant naît de cette union, Bharata, celui-là même qui va donner son nom à la lignée (Mahâbhârata signifie : la grande [histoire] des descendants de Bharata). Mais le roi ne revient toujours pas et Shakuntalâ part le rejoindre pour lui présenter son fils. Dusshanta fait mine de ne se souvenir de rien, à la grande indignation de la belle :


D'où vient, ô grand roi, que tu dises d'emblée, comme un homme de base caste : "Je ne sais pas", alors que tu sais !

Je vois bien que ton cœur hésite entre la vérité et le mensonge. Mon ami, tu as vu ! Alors, ne te rends pas méprisable à tes propres yeux.

Celui qui se prétend vertueux sans l'être, ce brigand, ce dissimulateur, quel mal ne fait-il pas ?

Tu as cette pensée : "Je suis seul !"
Tu ignores l'antique sage au fond de ton coeur
Qui connaît tes mauvaises actions.
Devant lui, tu commets le mal.

Quand tu as mal agi, tu penses : "Personne ne m'a vu !" Mais les dieux ont vu, et ton propre être intérieur.

Le soleil et la lune, le feu et le vent,
Le ciel, la terre et les eaux, ton coeur et Yama,
Le jour et la nuit, l'aube et le crépuscule,
Et Dharma, ils voient tout de la vie de l'homme.

Si l'âme qui séjourne en nous voit nos actions et est heureuse, Yama Vaivasvata efface nos fautes.

Mais si elle est malheureuse de son hôte mauvais, alors Yama emporte le pêcheur fautif.

C'est au mépris de son âme que l'on ment. Et les dieux n'aiment pas ceux qui ne font pas cas de leur âme !

Elle lui rappelle l'excellence d'une épouse :

"L'époux qui pénètre son épouse renaît à nouveau, grâce à cette génitrice. Voilà la qualité propre à la femme !" Tel est l'antique savoir des sages.

La descendance née de l'amour de l'homme sauve, par la continuité qu'elle assure, ses ancêtres disparus.

De l'enfer "Put", le fils sauve (trâ) son père. C'est pourquoi Svayambhû lui-même l'appelle fils (putra).

L'épouse s'active à la maison, l'épouse est fécondée, l'épouse ne vit que pour son mari, l'épouse se règle en tout sur lui.

L'épouse est la moitié de l'homme, l'épouse est le meilleur de tous les amis, l'épouse est la racine des trois castes, l'épouse est l'appui des mourants.

Marié, on accomplit les devoirs religieux, marié on devient maître de maison, marié on se réjouit, marié, on connaît le bonheur.

L'épouse est une amie qui console le solitaire, un père quand il s'agit du devoir, une mère quand il s'agit de peine.

Jusque dans la forêt vierge, elle est le repos du voyageur. L'homme marié est digne de confiance. L'épouse ainsi est le meilleur gage de réussite.

Même quand il est mort, et se débat seul pour se réincarner, l'épouse fidèle accompagne toujours son mari.

Morte la première, l'épouse tient bon et attend son mari. Docile, elle le suit s'il meurt en premier.

C'est pourquoi, ô roi, l'homme recherche le mariage, car l'époux garde sa femme dans ce monde-ci et dans l'autre.

Les sages disent : "Un fils, c'est un autre soi-même qu'on a soi-même engendré." C'est pourquoi l'homme doit considérer son épouse, mère de ses enfants, comme sa propre mère.

Le père qui a engendré avec sa femme un fils, dont le visage est comme le sien dans un miroir, se réjouit comme un homme vertueux qui a gagné le ciel.

L'homme avisé, quand il est tourmenté par la douleur ou la maladie, se tourne vers sa femme comme vers l'eau l'homme souffrant de la chaleur.

Que le sage, même en colère, ne dise rien de désagréable à sa femme, considérant le plaisir et la joie qu'elle procure, et sa disponibilité.

Les femmes sont le champ éternel de la fécondation. Et sans les femmes, qui, même parmi les Grands Anciens, pourrait engendrer une descendance ?

et la douceur d'un fils :

Quand un fils, couvert de terre et de poussière, se précipite vers son père, qu'y a-t-il de meilleur ?

Pourquoi méprises-tu ton propre enfant ? Tu l'as désiré, et son regard te demande.

Les fourmis s'occupent de leurs oeufs, sans les caser. Et toi, juste et bon, tu ne t'occuperais pas de ton fils ?

Le contact des vêtements, des femmes, de l'eau, ne donne pas autant de bonheur que celui de votre petit enfant qui vous embrase.

Chez les hommes, le brâhmane est le meilleur, chez les animaux, la vache. Parmi les gens que l'on vénère, le maître est le meilleur, parmi les gens que l'on caresse, le meilleur est le fils.

Laisse ce bel enfant te caresser. il n'y a pas ici-bas de caresse plus douce que celle d'un fils.

Elle rappelle ensuite la prééminence de la vérité :

Mieux vaut un étang que cent puits, mieux vaut un sacrifice que cent étangs, mieux vaut un fils que cent sacrifices, mais mieux vaut la vérité que cent fils.

Si l'on met en balance mille sacrifices du cheval avec la vérité, la vérité, sur mille sacrifices du cheval, l'emporte.

Dire la vérité égale, et même surpasse, l'étude des Ecritures entières, ou le bain dans tous les lieux de pèlerinage.

Aucun devoir ne prévaut sur la vérité, rien n'est au dessus de la vérité. Rien n'est plus terrible que le mensonge.

La vérité, ô roi, est l'essence même de Brahmâ, la vérité est la règle par excellence. Ne délaise pas cette règle, ô roi, mais que la vérité t'accompagne.


Il faudra cependant une intervention divine pour que Dusshanta accepte de reconnaître son fils.



Histoire de Sunda et Upasunda (Sundopasundopakhyânam)
Mahâbhârata, Livre I - 201 à 204


Sunda et Upasunda sont deux démons, deux frères, parfaitement unis. Pour conquérir "les trois mondes", ils se livrent à une grande ascèse :

Epuisés par la faim et par la soif, portant chignon et vêtement d'écorce, le corps couvert de poussière, ils se nourrissaient uniquement d'air,

Offraient leur propre chair en oblation, se tenaient debout sur un orteil, les bras en l'air, sans ciller des yeux. Longtemps, ils persévérèrent dans leurs vœux,

A tel point que les Monts Vindhya, échauffés par la puissance de leur ascèse, se mirent à fumer. Ce fut prodigieux !


Ils obtiennent ainsi une quasi immortalité ; Brahmâ accède en effet à leur requête :


"Qu'aucun être vivant dans les trois mondes, à l'exception de nous-mêmes, et qu'aucun objet inanimé ne puisent nous faire du mal."


Et ils en profitent immédiatement pour semer la terreur parmi les dieux et les hommes. Les dieux font alors appel à Brahmâ, qui imagine un stratagème :


Il se prononça pour la destruction des deux frères, et convoqua Vishvakarman. Dès qu'il le vit, il lui donna cet ordre : "Construis une femme sensuelle et désirable" - lui dit Brahmâ.

Vishvakarman rendit gloire à Brahmâ et lui obéit. Il fabriqua avec zèle une femme extraordinaire.

Il rassembla avec soin tout ce qu'il put trouver de beau dans les trois mondes, êtres vivants ou objets inanimés.

Il fit entrer dans la fabrication de son corps mille millions de joyaux, et donna vie à cette femme de gemmes construite, belle comme une déesse.

Façonnée avec le plus grand soin par Vishvakarman, elle surpassait en beauté toutes les femmes

Il n'y avait pas un atome de son corps qui ne soit d'une beauté parfaite et le regard ne pouvait s'en déprendre.

Cette femme désirable, belle comme Shrî en personne, captivait l'oeil et l'esprit de tous les êtres.

Comme elle avait été façonnée de bijoux qu'on avait rassemblés grain à grain, Brahmâ la nomma Tilottamâ : Grain Précieux.


Et Tilottamâ, par sa seule présence, amène les deux frères à s'entre-tuer :


C'est alors que Tilottamâ parut. Elle avait endossé une tenue suggestive et cueillait des fleurs dans la forêt, à demi vêtue d'une étoffe rouge.

Elle cueillait des fruits au bord de la rivière, tout en s'approchant doucement de l'endroit où se tenaient ces deux démons.

Ils avaient bu, leurs yeux étaient rougis par l'ivresse. La vue de cette belle femme les ébranla tous deux.

Ils se levèrent de leurs sièges et s'avancèrent vers elle. Tous deux étaient fous de désir, tous deux avaient envie d'elle.

Sunda saisit la belle Tilottamâ par sa main droite, Upasunda par sa main gauche.

Ivres des dons reçus, de leur force innée, de leurs richese et de leurs trésors, ivres de boisson,

Et rendus furieux par toutes ces ivresses, aveuglés par la passion et le désir, l'oeil noir, ils se dirent l'un à l'autre :

"C'est ma femme, respecte-la !" déclara Sunda. "C'est ma femme et ta belle-soeur !" déclara Upasunda.

"Elle n'est pas à toi, elle est à moi !" La colère les gagna. Tous deux, à cause d'elle, saisirent leur redoutable massue .

Ils saisirent leur masue redoutable, égarés par le désir : "C'est moi le premier, c'est moi le premier !" et ils s'entre-tuèrent.



Histoire d'Ambâ (Ambopakhyânam)
Mahâbhârata, Livre V - 170 à 193


Ambâ a été enlevée par Bhîshma, qui voulait la donner pour femme à son frère : mais elle aime le roi Shâlva. Bhîshma la laise repartir, Shâlva la repouse ! Ambâ, sa vie détruite, jure de se venger. Râma, l'invincible guerrier qui a débarrassé la terre de tous ses guerriers à vingt et une reprises, prend son parti et défie Bhîshma : le combat dure vingt-trois jours et reste sans vainqueur. Ambâ se réfugie dans la forêt et se livre à des austérités terribles pour renaître homme et pouvoir tuer Bhîshma. Shiva lui promet qu'il en sera ainsi, et elle s'immole par le feu. Las, elle renaît Shikhandinî, fille du roi Drupada, auquel Shiva avait pourtant promis un fils ! Drupada, fort de la promesse de Shiva, l'appelle Shikhandin, l'élève comme un garçon, et la marie même à la fille d'un roi allié. Le scandale éclate, et Shikhandinî va chercher refuge dans la forêt, se livre de nouveau à des austérités farouches et obtient de changer de sexe avec un brave génie. Elle est maintenant vraiment Shikhandin, et, au cours de la grande bataille, tuera effectivement Bhîshma.

Nous donnons ci-desous un extrait du combat entre Bhîshma et Râma


Le jour suivant, je m'avançai, et le combat avec Râma fut de nouveau tumultueux et cruel.

Tout au long du jour, ce valeureux guerrier, fin connaisseur d'armes divines, en fit grand usage.

Je les détruisis par des armes appropriées, en dépensant, au cours de ce tumultueux combat, une énergie inimaginable.

Le glorieux Râma s'irrita de voir ses armes détruites en grand nombre par les miennes, malgré l'énergie qu'il dépensait aussi.

Arrêté par mes armes, le grand Jâmadagnya (Râma)
Lança alors un trait à l'aspect redoutable,
Météore enflammé de la fin des temps :
L'éclat de sa pointe aveuglait les mondes !

Et de mes flèches ardentes,
En trois je coupai ce trait lancé sur moi,
Brillant comme le feu de la fin des temps,
Et le fis tomber à terre : un vent suave s'éleva.

Enflammé de colère de voir ses flèches détruites,
Râma lança douze autres traits redoutables.
Leur aspect est impossible à décrire
Tant ils étaient rapides et lumineux.

En vérité, je fus effrayé de les voir
Surgir de l'espace comme des météores.
Leur aspect était divers, leur éclat terrible,
Ils brillaient comme douze soleils à la fin du monde.

Je m'attaquai alors à ce réseau de flèches,
Les visai et les coupai des miennes.
J'en décochai douze dans cette attaque,
Et détruisis ainsi ses traits redoutables.

Le noble Jâmadagnya (Râma) alors décocha
D'autre traits redoutables, à la tige d'or.
Ils étaient peints et ceints de lanières dorées,
Ils rayonnaient comme de grands météores.

Mon bouclier me protégea de ces traits terribles,
Mon épée les détruisit lors de cet assaut,
Et de mes flèches divines j'inondai en ce combat
Les chevaux divins de Jâmadagnya (Râma) et son cocher.

Voyant brisées ses flèches rehaussées d'or,
Et dénudées comme un serpent pendant sa mue,
Le noble Râma le vainqueur du chef des Haihaya
Rageur, fit apparaître une arme divine.

Alors de terribles essaims ardents de flèches
S'abattirent sur moi comme des sauterelles.
Il en perça violemment mon corps,
Mes chevaux, mon cocher et mon char.

Ses traits de toutes parts percèrent mon char,
Mes coursiers et mon cocher, ô roi.
De ses flèches, il fendit et brisa
Le joug et le timon, l'essieu et les roues.

Dès la fin de cette pluie de traits,
J'arrosai mon maître d'un flot de flèches,
Et lui, ce puits de science, percé par elles,
Versa un sang abondant de son corps blessé.

Râma souffrait de mes volées de flèches,
Et moi j'étais blessé et transpercé.
Le combat cessa à la fin du jour, alors que le soleil
Soupirait après la montagne du couchant.




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